Après avoir fait la une des classements économiques, les GAFA font tour à tour la une des journaux pour de l’optimisation fiscale, puis pour un manque de contrôle sur les courants extrémistes et/ou illégaux (affaire de la tuerie de Christchurch…) et plus récemment pour la manipulation des masses en tant que vecteurs de fake news…
La belle machinerie semble avoir les rouages grippés et nous sommes en droit de nous poser des questions sur l’influence que ces GAFAs peuvent avoir sur nos vies. Sommes-nous totalement libres ou nous sommes-nous, de nous-mêmes et de plein gré, complètement enchaînés à ces systèmes régis par des algorithmes ?
Jusqu’où va leur influence et est-elle si bénéfique cela ?
Je laisserai donc la parole à Stéphane Alaux qui, dans son livre sur l’E-réputation, y consacre un chapitre :
Ouah, je suis complètement GAFA !
C’est un continent sans frontière : comment le contrôler ?
Mais, en définitive, peut-on vraiment tout faire ? Le web est-il synonyme de liberté totale ? Le discours a changé avec l’essor de géants qui contrôlent le nouvel eldorado. Il est temps de retrousser les manches pour faire un peu de « nettoyage » sur le net, car les problèmes de pouvoirs sont réels. En effet, à elles seules, quelques firmes technologiques privées structurent le secteur et conditionnent désormais le reste de l’économie ! L’actualité est brûlante, sur fond de bras de fer technologique et d’appétits fiscaux entre les USA et l’Europe !
L’acronyme célèbre de « Google, Apple, Facebook et Amazon » (GAFA) est le sigle qui désigne les principaux acteurs du web. Mais ces 4 géants du web ne sont pas seuls. La liste peut être allongée, par exemple en ajoutant un « M », les GAFAM, pour tenir compte de Microsoft. Mais, aussi, plus généralement, inclure ces GAFAM aux 10 à 15 autres grands groupes leaders du web : Airbnb, Alibaba, LinkedIn, Netflix, Uber, Tesla, Twitter…
Doit-on ajouter les « Licornes »? Je pense que oui, il ne faut pas les oublier, car ces sociétés à très fort potentiel sont les futurs géants du web : il y en a une centaine au Etats Unis, presque autant en Chine, environ 3 fois moins en Europe et seulement quelques-unes en France…
Toutes ces entreprises changent le présent de l’économie réelle, dont elles deviennent le passage nécessaire. Comme on l’a vu, en 2018, Facebook a dépassé les 2 milliards d’utilisateurs dans le monde… ?Petite pause pour bien réaliser le chiffre : 2 milliards de personnes? mais les autres géants privés ne déméritent pas non plus, intéressant des centaines de millions d’usagers. Comme Gmail : 500 millions, Amazon 120 millions… Bref, un impact de premier plan mondial, direct et quotidien. Et l’on constate que Google atteint quant à lui près de 20 milliards de requêtes mensuelles !
Que dire si ce n’est valider le fait que tout est centralisé au sein du « pouvoir des 4 GAFA» selon Scott Galloway. Cela pose différentes questionsessentielles. D’abord ce pouvoir s’organise autour d’un leadership technologique de grands groupes privés. C’est sans doute pour cela que, lorsque l’on parcourt les écrits actuels sur le sujet, les livres critiques sont assez nombreux, alors qu’au milieu des années 2000, la presque totalité des ouvrages consacrés au web étaient des panégyriques.
Sans parler de «tribunal du net», aujourd’hui la littérature penche donc plutôt vers le réquisitoire, bien que les lignes directrices de chaque écrit me semblent assez divergentes quant au fondement de la contestation. Le problème repose-t’il uniquement sur le fait que le pouvoir technique réunit toute l’organisation des relations entre personnes aux technologies exclusives proposées par le biais de quelques sociétés ?
Il y a une confusion due à l’imbrication de plusieurs problèmes. Pour moi, 3 choses essentielles découlent du « passage obligé » par ces grands groupes technologiques, devenus des opérateurs d’influence de la vie quotidienne des internautes.
TECH : la disparition de la liberté de choisir une autre technologie.
LIBERTES : l’abandon de vos données personnelles à une Big Data, elle-même privée. FINANCES ET FISCALITE : un monopole économique privé qui ne paye pas ses impôts ? Telle est bien la réalité : si l’on cumule le temps passé par les citoyens devant leur écran chaque jour on est stupéfié. Alors que la radio, puis la télé dominaient largement les loisirs il y a encore moins de 10 ans, aujourd’hui le web et les réseaux sociaux ont pris le lead sur l’information autour de quelques entités gigantesques, quelques « Géants du web » pour reprendre la belle expression d’Octo.
Technologiquement parlant, « l’économie de la relation à l’autre est structurée par une intermédiation » basée sur le croisement des meilleures technologies informatiques et télécoms. Les algorithmes dominent, ainsi que l’Intelligence Artificielle (IA), de plus en plus présente. Les internautes pensent en profiter : assistance vocale, aide à la recherche, le citoyen digital est pris en mains par un ensemble de technologies croisées pour chercher, converser, rencontrer !
Mais, en concentrant toutes leurs activités numériques sur quelques plateformes, les internautes ont contribué à nourrir un club très fermé d’acteurs mondiaux qui prospèrent, sans être contrôlés par qui que ce soit. Les géants avaient déjà de l’appétit, ils deviennent maintenant des ogres, jouissant d’une exclusivité technologique dont la description emprunte au vocabulaire politique. On parle de « pouvoir » des algorithmes et « d’ambition » des plateformes… (Sic Olivier Ertzschein, auteur de Appétit des géants, pouvoir des algorithmes, ambition des plateformes » est Maître de Conférences en Sciences de l’Information et de la Communication et spécialiste des enjeux politiques, économiques et sociétaux d’Internet).
Cette habitude, parfois une addiction, des milliards d’humains connectés aux mêmes réseaux sociaux, aux mêmes plateformes de recherche, comment influe-t’elle sur leur liberté d’expression, de choix ? Il n’est pas aisé de préserver un libre arbitre, quand on abandonne à des sociétés privées nos données personnelles, sachant qu’elles sont revendues à des sociétés qui ensuite nous contactent, qu’on le veuille ou non. La question centrale serait alors celle de l’intrusion dans la vie privée. Il faudrait bien sûr réguler cette collecte privative de milliards de données personnelles tout au long de l’existence. Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Peut-on dès lors parler d’une véritable dictature du numérique ? Un chercheur américain envisage dans une récente étude, le démantèlement des GAFA. Faudrait-il aller jusque-là ?
De tout cela découle encore un autre problème, essentiellement financier et fiscal, mais pas que. En effet, le trafic commercial sur le web est-il de libre concurrence aujourd’hui ? Il s’agit de confier l’avenir de notre vie quotidienne à une économie numérique durable. Une économie qui ne serait pas confisquée par une petite poignée de sociétés omnipotentes sur le web ? Bien sûr, l’on pourrait noter que c’est comme cela aussi dans bien des secteurs : Energie, Médias….
L’ambition du web est d’être le portail de la vie économique et soi-disant, d’être le garant de la démocratie. Portail universel, le net enserre à ce titre tous les autres secteurs. Si tout passe par le web, ses acteurs doivent jouer le jeu en matière d’ouverture à la libre concurrence et aussi en matière de fiscalité ; C’est loin d’être le cas actuellement : la Commission européenne poursuit les GAFA sur le terrain fiscal et légal. L’Union européenne cherche à obliger certains des grands groupes américains du Web à payer leurs impôts, constatant un manque à gagner significatif dans les caisses des Etats membres.